Et le voilà mon gros bébé, garé devant chez moi. Chaque matin, lorsque je sors, mon cœur tressaute en le voyant, mon Dieu tout ce qu'il représente. Chaque matin, mon cœur explose... Je ressens tellement de gratitude et en même temps tellement d’inquiétude. Mais je dois avancer, pas le temps de réfléchir, d'hésiter ou d'être fatiguée. De mon côte, c'est dur, depuis le début 2021, je suis à bout, 2020 a eu raison de moi et intérieurement, j’appelle de tout mon être un temps de vide, un espace de vide fertile, comme la terre fraîchement retournée, ou il n'y a rien, mais ou tout est possible. D'un côté, je dois faire tourner mon entreprise et d'un autre, j'appelle de toutes mes forces cette pause salvatrice, ce moment suspendu pour me retrouver, créer, inventer, penser...
Et bien évidemment comme à chaque fois que nous sommes dans une incohérence entre le conscient et l'inconscient, ou bien dés lors que l'on ne parvient pas à faire un choix, la vie intervient et le fait pour nous. Je lance sans grande conviction la quatrième saison d'Hack Yourself, je dois le vendre, mais je veux du temps. Et bien, il ne se vend pas, seulement deux participants, ça ne suffit pas à couvrir mes charges. Ce que j'ai réussi à éviter il y a un an arrive maintenant, je dois tout quitter. La décision s'impose, je dois lâcher mon appart, mon cabinet, Senseï est bel et bien maintenant mon seul refuge, il porte dès lors un enjeu colossal pour moi.
Cependant, je suis en accord avec ce déroulement des choses, si je fais preuve d’honnêteté, il s'est créée ce que j'ai appelé et c'est probablement le mieux qui puisse m'arriver, je l'avais dit une voie initiatique et bien, nous y sommes.
Mais j'ai une bonne étoile de compétition avouons-le. Lorsque je parle de ma situation à mon propriétaire de Montreuil, il ne veut pas me laisser partir et m'autorise à sous-louer, en 24 h, je trouve quelqu'un, voilà l'appart est là, il m'attendra et je resterais libre de décider de mon mode de vie. Je ne voulais pas être contrainte de faire ce choix, mais le faire librement. Olivier B, mon propriétaire me l'a permis. Merci à toi, mon ange gardien, tu es d'une générosité et d'une bienveillance folle et je ne saurais jamais exprimer assez ma gratitude. Merci.
Voilà, je dois pour autant quitter l'appartement le 10 juillet. Avant cela, finir Senseï, vider les lieux, lâcher le cabinet, travailler...
C'est partis, un peu amochée, mais de nouveau, comme un an auparavant, dans cette urgence qui pousse dans les limites et déplace les possibles.
Et puis, Montreuil, magique Montreuil, ce passage qui s'annonçait difficile devient magique.
Senseï est stationné devant chez moi, et chaque matin, je salue le voisin d'en face qui fume sa clope sur le trottoir, je me paie le culot de lui demander s'il serait ok pour me prêter de l'électricité le temps du chantier, je découvre Olivier et sa femme Lucie, on devient amis. On rit, ils me soutiennent et j'en ai besoin. Chaque étape du chantier revient à découvrir un vice, une erreur de l'artisan, je serais repassé sur tout ce qu'il a fait. Dur, mais je ne suis pas seule. Avec olivier, on s'adonne à des pauses philo, il est juriste punk, payé pour réfléchir et remettre en question nos institutions. A chaque fois qu'il sort fumer, on papote et on réfléchit, il me fait grandir. Merci à toi Olivier, j'ai de la chance. Et puis Lucie bien entendu sa douceur, son optimisme et sa joie à chaque entrée et sortie de la maison.
Et puis sur le trottoir, il se crée une sorte d’effervescence autour du van, les voisins viennent chaque jour prendre des nouvelles du chantier, chacun y va de son conseil, de son expertise, de son astuce, je ne suis jamais seule. Et puis il y a Felipe voisin de gauche d'Olivier et Lucie, menuisier dans le spectacle. Il est d'une aide précieuse, je dois l'avouer, sans lui, je n'y serais pas arrivé. Il est vraiment partie intégrante de la réussite du projet. Merci Felipe.
N'oublions pas Patrick mon voisin de palier, intermittent qui a bien souffert de l'arrêt de son activité, et qui est venu prendre l'air avec moi en bricolant. Merci à toi Patrick. Et puis encore Basile, voisin de droite d'Olivier et Lucie qui est venu aussi prêter main forte pour le plafonnier.
Beaucoup d'hommes me direz-vous, mais il y a eu aussi Cathy ma voisine du rez-de-chaussée avec qui nous avons fait le stylisme du van, le choix des couleurs et leur répartition.
Et puis Janine autre voisine du rez-de-chaussée, la mascotte du 39 avenue Faidherbe. Toujours attentive et présente avec ces gentils mots et ces douces attentions.
Ce qui devait être une épreuve difficile est devenu une aventure collective et joyeuse, l’opportunité de rencontres et d’amitiés. Et tout cela a bien évidemment finit en apéro trottoir autour du van. Merci à tous, merci Montreuil, improbable ville plurielle.
17 juin Senseï est prés, grâce à tous !